La chute de Mobutu Sese Seko: l’homme qui croyait être immortel
Le Guide suprême, le Léopard du Kawele, le Bâtisseur, l’Unificateur, les superlatifs se bousculaient au perron du Roi Marechal pour célébrer son indicible grandeur. Sa chute, aussi spectaculaire que dramatique, marquera à jamais l’histoire du Congo.
Son inénarrable invincibilité, sa légendaire combattivité. Si grand, si puissant qu’on le croyait immortel. Si fort si terrifiant qu’on le disait éternel. Mais vous connaissez la maxime chrétienne : Dieu a horreur de ceux qui se prennent pour lui. Et pour Mobutu tout s’est joué en 3 semaines. 3 semaines pour sceller une déchéance. 3 semaines pour s’engouffrer dans les couloirs sombres de l’histoire. Entre les mois d’avril et de mai 1997, son sort est scellé. Affaibli par la maladie, acculé par les forces de Kabila, le maréchal s’envole pour Lomé avant de rejoindre Rabat. L’exil…la fuite !
La fin d’un règne
Dans son livre « Mobutu », Jean-Pierre Langellier, ancien journaliste au Monde, raconte. « Le 29 avril [1997], Mobutu, entouré de sa famille et de ses proches collaborateurs, reçoit chez lui une délégation américaine de haut niveau, conduite par l’ambassadeur auprès des Nations unies, Bill Richardson, et qui comprend des diplomates, des membres du Conseil national de sécurité et des gens de la CIA. Manière de bien faire comprendre au « Grand Léopard » qu’il ne pourra plus jouer les uns contre les autres, et qu’il lui faut accepter sa « dernière chance » de partir « dans l’honneur et la dignité ».
Poussé dans les cordes et désormais sans forces, Mobutu capitule mais pose une seule condition : sa sécurité personnelle et celle de sa famille. Nullement impressionné, Richardson hausse le ton et remet à Mobutu une lettre de Bill Clinton le pressant de rencontrer Kabila et de nommer une équipe chargée de négocier le transfert du pouvoir. Faute de quoi, ajoute Richardson, « votre cadavre sera traîné dans les rues […] et nous n’y pourrons rien ».
La déchéance d’un dictateur
Malade d’un cancer de la prostate, incapable d’enclencher la moindre résistance, Mobutu capitule. Ses collaborateurs rédigent une lettre destinée à Clinton. Mais par la suite le dictateur tente un ultime baroud d’honneur sous forme de bluff. Plus question de démissionner. Il accepte seulement de rencontrer Laurent-Désiré Kabila. Le rendez-vous Mobutu-Kabila est prévu le 2 mai au large du port congolais de Pointe-Noire sous l’égide de Nelson Mandela. Malade, l’œil droit sérieusement amoché par des métastases Mobutu se pointe laborieusement au rendez-vous. Déjà en position de force Kabila le snobe au travers d’un grossier dilatoire. « Je n’ai pas reçu d’invitation », se moque-t-il. A la vérité Kabila sait qu’il a déjà gagné le match. Il n’attend plus que le couronnement de sa marche royale vers le pouvoir suprême.
Les conséquences d’une politique corrompue
Miné par des décennies de corruption, le régime n’a pas résisté à la tentative d’introduction du multipartisme décrétée par le maréchal, s’installant dans une crise durable, émaillée de pillages et de violences. Le coup de grâce aura pour origine l’afflux, en 1994, de centaines de milliers de Hutu rwandais, dont des responsables du génocide, chassés de leur pays par l’avancée du Front patriotique rwandais. Leur présence dans des
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