Chez Balzac, « la discrétion est le plus habile des calculs ». Ici, c’est un peu différent. Yamina est une Algérienne d’Aubervilliers qui, dans son pays natal, pendant la guerre, « a senti que rester invisible était une question de survie ». La France a dû lui sembler assez accueillante pour qu’elle continue à ne pas la ramener : dans le bus, son HLM, l’éducation donnée à ses trois filles et son fils. Pour dire cette existence passée à raser les murs, « l’exil et son lot de dommages collatéraux », les hontes de cette Mère Courage et la façon dont elles pèsent sur ses enfants, ajouter du spectaculaire à la douleur aurait été obscène. La romancière de « Millenium Blues » a donc choisi un style presque invisible, lui aussi. Sa « Discrétion », remarquable de justesse, rend justice à ses personnages pour examiner de l’intérieur les questions très actuelles du racisme ordinaire, de la psyché postcoloniale, de la virilité, des inégalités homme-femme. Et cela vaut bien des discours savants pour ausculter, sous le patronage discret de Fanon, une famille travaillée en sourdine par la nostalgérie. La dernière page, incidemment, nous informe que le père de Faïza Guène est « mort de discrétion ».
Conseil de lecture : ne manquez pas de lire « Terres rares » de Jean Tuan chez C.L.C. Editions (sortie le 09 mars 2020). Un néo-polar épicurien et érudit qui dévoile les menaces que la Chine fait peser sur le monde. Lecture édifiante et jubilatoire ! Disponible en librairie et via les principaux sites d’internet.
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SOURCE: https://www.w24news.com
